Les dictats des magazines se suivent et surtout ne se
ressemblent pas : ce qu’il faut, ce qu’il ne faut pas, ce qu’il ne
faut plus, ce qui est Up ou bien ce qui est Down, ce qui colore
l’étendue de nos ciels, en nous offrant mois après mois un
nouvel horizon. Up&Down paintings, Collection 2005/2006,
constitue un ensemble de onze peintures mesurant chacune
195cm de hauteur par 120cm de largeur et qui se développe
sur environ quinze mètres, tel une immense fresque.
Chaque texte a été scrupuleusement recopié, y compris ses
fautes d’orthographe, tiré du « Baromètre des Tendances »
du magazine l’Officiel d’août 2005 à juin-juillet 2006, un an
exactement. Fut-il abandonné à cause des Down qui discréditaient
des personnalités ? Dans la première émission de
Télé réalité Loft, les gens votaient par SMS : PART, pour la
personne qu’ils voulaient voir partir. Le SMS à taper a vite été
modifié par : RESTE, plus positif… la rubrique Up&Down s’est
transformée l’année suivante en rubrique uniquement Up.
Ces 10 commandements ou « commande-moi » de l’apparence
témoignent d’une quête autoritaire de la perfection,
à appliquer sans distance alors même qu’elle nous échappe
sans cesse. En quête d’identité ? « I shop therefore I am »,
répond Barbara Kruger. Mais ici, les Up&Down nous dictent
non seulement ce qu’il faut porter mais aussi quelle personnalité
(acteur, modèle, chanteur, artiste, réalisateur) aimer ou
détester, où aller ou ne plus aller en vacances ou en boîte,
quelle voiture acheter, quel film voir, quel sport pratiquer ou
abandonner, quelle boisson boire, quelle musique écouter,
quel style ou attitude adopter, quel produit de beauté utiliser
ou quel animal domestique prendre… Pour les Up, on passe
allègrement et sans transition de Lou Doillon dans la pub
Miu Miu, à faire la fête, aux Poèmes, Buenos Aires, Annette
Messager, les bottes à lacets ou la Tour Eiffel… et pour les
Down, des moustiques, des prénoms Rita et Katrina, à Luc
Besson, l’autobronzant, ou encore les petits chiens au bras,
le tout bien mélangé… bref, plus aucune excuse pour ne pas
atteindre la perfection ! Nicole Tran Ba Vang a patiemment
collecté chaque mois ces Up&Down. Ils entraient en résonance
avec son travail sur les collections liées aux saisons
avec de la pression en plus due au rythme mensuel et sur un
terrain plus élargi. L’artiste a décidé de les prendre au pied de
la lettre. Elle a peint des nuages pour l’idée d’élévation spirituelle
et du temps en écho à l’idée de sacralisation, du culte de
l’apparence et de l’image déjà évoquée à travers les « Collections
Icônes ». Mais c’est aussi une invitation à la rêverie en espérant
que le spectateur s’immerge dans la peinture s’abandonnant
à un état de contemplation. Tout comme les nuages,
le phénomène de la mode est volatil. En révélant la part
poétique de ces étranges inventaires, Nicole Tran Ba Vang
tente de capter l’esprit fugitif du moment avec une légèreté
qui, l’air de rien, touche à des choses existentielles.